L’impacte de la blockchain sur la gestion des droits

Cette technologie permet non seulement de prouver la création d’une œuvre par horodatage, mais aussi de garantir le respect des droits patrimoniaux et moraux de l’auteur.
L'impacte de la blockchain sur la gestion des droits d'auteurs

Dans un contexte international de bouleversement technologique, l’usage de chaines de blocs, dites « blockchains », prend de plus en plus d’ampleur depuis son apparition en 2008.

Elle est définie juridiquement pour la première fois dans l’ordonnance du 28 avril 2016 n°2016-520 relative aux bons de caisse comme un « dispositif d’enregistrement électronique partagé permettant l’authentification de ces opérations dans des conditions, notamment de sécurité, définies en Conseil d’Etat » (article L223-12 du Code monétaire et financier).

Si la blockchain s’est en premier lieu illustrée comme la technologie sur laquelle reposent les transactions financières en matière de crypto monnaie, le potentiel de cette innovation s’étend désormais à tous les secteurs.

S’agissant précisément du domaine de la propriété intellectuelle, le Directeur de l’Agence de Protection des Programmes (APP) relevait déjà en 2018 que ce procédé séduisait de plus en plus d’acteurs de la propriété intellectuelle qui y voyaient une nouvelle façon de gérer les droits d’auteur.

Qu’est-ce qu’une Blockchain ?

Le mathématicien Jean-Paul Delahaye décrit la blockchain comme « un très grand cahier, que tout le monde peut lire librement et gratuitement, sur lequel tout le monde peut écrire, mais qui est impossible à effacer et indestructible. »

Selon les termes de la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) la blockchain est « une technologie de stockage et de transmission d’informations, transparente, sécurisée, et fonctionnant sans organe central de contrôle.»

Elle constitue une base de données qui contient l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création, sécurisée et distribuée : elle est partagée par ses différents utilisateurs, sans intermédiaire, ce qui permet à chacun de vérifier la validité de la chaîne.

Il existe des blockchains publiques, ouvertes à tous, et des blockchains privées, dont l’accès et l’utilisation sont limitées à un certain nombre d’acteurs.

«Une blockchain publique peut donc être assimilée à un grand livre comptable public, anonyme et infalsifiable. »

La finalité de la blockchain est de stocker des informations dans des blocs, qui mis à la suite composent une chaîne, puis plusieurs chaines de manière infinie, sécurisant ainsi les données selon une technologie algorithmique et de codage infalsifiable.

Un nouvel outil de gestion des droits d’auteurs

Le recours à la blockchain comme mode de preuve en droit d’auteurs

La question de la valeur probante d’une information issue de blockchain a été posée et le Gouvernement français y a répondu le 10 décembre 2019 (réponse publiée au Journal Officiel) indiquant que « si aucun texte juridique ne mentionne spécifiquement la blockchain, il n’en résulte pour autant aucun vide juridique ».

En effet, la preuve d’un acte juridique dont le montant est inférieur à 1500 € est libre (article 1359 du Code civil).

Si un écrit est en revanche obligatoire pour un montant supérieur, l’article 1366 du Code civil interdit la discrimination entre l’écrit papier et l’écrit électronique, un écrit électronique issu de la blockchain est donc valable.

C’est en tout état de cause au juge d’évaluer la valeur probante de l’écrit issu de la blockchain. 

Ainsi pour la première fois, par jugement du 20 mars 2025 le Tribunal Judiciaire de MARSEILLE (1ʳᵉ Chambre civile, RG n°23/00046) a donné une valeur probante à un horodatage sur une blockchain permettant, outre le fait de déterminer la date de création d’une œuvre, d’établir la preuve de la titularité des droits patrimoniaux de son auteur et caractériser la contrefaçon de ses droits d’auteur :

« En l’espèce, la titularité des droits patrimoniaux d’auteur relatifs aux vêtements Hearts from Alber et Love from Alber au profit de la société AZ FACTORY est établie par les deux constats de l’horodatage Blockchain en date des 05 mai 2021 et 15 septembre 2021. »

Attention toutefois, car il est difficile d’établir avec certitude la propriété des informations contenues dans une blockchain dès lors que toute personne peut diffuser une œuvre dans une blockchain sans en détenir nécessairement les droits.

La traçabilité de l’œuvre dans le respect du droit moral de l’auteur

Appliquée au droit d’auteur qui encadre la protection des œuvres de l’esprit dans les domaines de la musique, de la photographie, de la littérature, du cinéma ou encore des logiciels, la technologie blockchain permet de protéger le droit moral de l’auteur en tous ses attributs et de lutter contre la contrefaçon.

Une œuvre est enregistrée par horodatage sur une blockchain assurant ainsi son existence à une date certaine et permettant d’identifier à la fois l’œuvre et son auteur.

Cela garantie le droit de l’auteur au respect de la paternité de l’œuvre.

L’horodatage est une garantie d’inaliénabilité de l’œuvre et d’inaltérabilité de son contenu protégeant ainsi le droit au respect de l’œuvre, incluant son intégrité formelle (interdiction de toute modification sans autorisation de l’auteur) et l’absence d’altération de son esprit.

Cela donne accès à un historique de l’œuvre, celle-ci étant traçable de par son existence sur une blockchain publique ou privée. En tout état de cause dans le respect du droit de divulgation de l’œuvre.

Dérives Possibles

Dans le cadre d’un système centralisé, les informations qui circulent entre les utilisateurs sont placés sous l’autorité d’un serveur central qui, en cas de défaillance, entraine la défaillance de l’ensemble du système.

La blockchain repose sur un système de réseaux peer-to-peer (pair-à-pair), système réputé pour sa robustesse du fait de son fonctionnement décentralisé.

Les réseaux peer-to-peer permettent donc un partage rapide et sécurisé des fichiers directement entre les utilisateurs, mais sans contrôle.

En conséquence, une œuvre enregistrée sur une blockchain pourra être largement diffusée sur les réseaux peer-to-peer sur lesquels la blockchain repose sans que le fichier qui la contient ne soit contrôlé par un organe central.

En cela, il peut être porté atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur si la diffusion de l’œuvre est effectuée sans l’autorisation de l’auteur, de ses ayant-droits et/ou de son gestionnaire.

Faire appel au cabinet Chamfeuil

Le cabinet CHAMFEUIL travaille avec des prestataires qui peuvent vous proposer d’horodater vos créations afin d’en obtenir une datation certaine et d’en conserver une sauvegarde sécurisée. 

Maître CHAMFEUIL peut aussi vous accompagner et vous conseiller afin de protéger au mieux vos œuvres dans la gestion et la défense de vos droits d’auteur.

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