Le contentieux du cautionnement

Explorez les aspects juridiques du contentieux de cautionnement, y compris les droits et obligations des parties impliquées, ainsi que les procédures judiciaires pertinentes. Informez-vous sur la gestion des litiges liés aux contrats de cautionnement.
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Le cautionnement est un outil de sécurisation de la dette souvent utilisé par les créanciers professionnels.

L’existence d’une caution est parfois un prérequis indispensable à la conclusion de certains contrats dont le prêt bancaire, le bail commercial ou encore le bail d’habitation.

Savoir comment s’engager en tant que caution en prenant un maximum de précautions est donc primordial, notamment face à un paiement dû à un créancier professionnel.

Qu’est-ce que le cautionnement ?

Le formalisme à respecter

Le cautionnement est un acte juridique appartenant à la famille des sûretés personnelles, défini par l’article 2288 du Code civil comme le contrat « par lequel une caution s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci ».

Le cautionnement est un contrat unilatéral et accessoire qui garantit au débiteur principal que l’obligation sera bien exécutée. La portée de cet engagement varie en fonction de la nature du cautionnement souscrit. Ainsi, la créance contractuelle pourra être exigée si le débiteur ne respecte pas ses engagements. Il est recommandé de consulter un avocat pour bien comprendre les implications de cet engagement.

En tant que caution, vous serez la personne qui devra rembourser la dette si le débiteur principal est finalement dans l’impossibilité matérielle de la rembourser au moment venu. Ce remboursement portera sur la créance correspondante.

Que vous soyez une personne physique ou une personne morale, vous pouvez vous engager en tant que caution.
Si vous êtes engagé en tant que caution simple, le créancier devra d’abord s’adresser au débiteur principal pour le remboursement de la dette, et ce n’est que si celui-ci est insolvable qu’il pourra s’adresser à vous, situation dans laquelle un avocat pourra intervenir pour défendre vos intérêts.

Si vous êtes engagé en tant que caution solidaire en revanche, le créancier pourra s’adresser directement à vous en cas d’inexécution du débiteur principal, afin de recouvrir la créance dans son intégralité. Dans ce cas, l’intervention d’un avocat est souvent déterminante pour protéger vos droits et vous accompagner dans la gestion de ce risque.

L’acte de cautionnement est soumis à un formalisme assoupli depuis le 1er janvier 2022 aux termes du nouvel article 2297 du Code civil issu de la réforme du droit des sûretés.

Ainsi, la caution personne physique devra mentionner qu’elle « s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, le cautionnement vaut pour la somme écrite en toutes lettres. »

A défaut de contenir ces mentions obligatoires l’acte sera susceptible d’annulation.

Ces mentions ne sont pas requises pour les personnes morales.

Il n’est plus obligatoire d’apposer ces mentions de manière manuscrite, en raison de l’admission récente de la conclusion du contrat de cautionnement par voie électronique.

Quelles sont les conditions de validité d’une caution ?

En tant que contrat, l’acte de cautionnement doit répondre aux conditions de validité des actes juridiques, à défaut l’acte sera à nouveau susceptible d’annulation :

  • Un consentement manifesté de manière libre et éclairé,
  • Une capacité à consentir,
  • Un contenu licite et certain
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Vos moyens de défense face au créancier professionnel

En tant que caution, vous devez être suffisamment informé lors de la souscription du contrat relativement au montant de votre engagement et éventuellement à sa durée.

Le créancier doit avoir préalablement vérifié votre solvabilité.

Le créancier doit également vous conseiller et vous fournir des informations pendant toute la durée du cautionnement.

Autant de sujets sur lesquels la responsabilité du créancier peut être engagée en cas de manquement.

La disproportion de l’acte de cautionnement

Toute l’obligation qui incombe à la caution repose sur sa capacité financière à assurer le paiement de la dette en cas d’incapacité du débiteur principal. Le paiement de la créance ne doit intervenir qu’après une évaluation rigoureuse de votre capacité financière.

Il appartient à la banque ou à tout organisme de crédit de vérifier que votre engagement est proportionné à vos ressources et à votre patrimoine. Si ce n’est pas le cas, vous pourrez vous dégager de votre obligation en démontrant que la banque n’a pas été suffisamment diligente dans l’évaluation de votre capacité d’engagement.

Le créancier professionnel, en particulier la banque, doit vérifier les informations transmises par la caution sur ses ressources. Toutefois, il est strictement imposé aux banques de ne pas se limiter à ces informations (Cour de cassation, Chambre commerciale, 8 janvier 2020, 18-19.528).

Si c’est le cas, l’acte est entaché de disproportion manifeste.

Selon la jurisprudence, cette disproportion s’apprécie au regard des ressources de la caution à la date de souscription du cautionnement (Cass. com. 12 mars 2013 n° 11-29.030, CA Versailles 5 février 2015 n° 13/02658 et Cass. com., 15 décembre 2009, n°08-70.226).

Il appartient à la banque ou à tout organisme de crédit de vérifier que votre engagement est proportionné à vos ressources et à votre patrimoine. Si ce n’est pas le cas, vous pourrez vous dégager de votre obligation en démontrant que la banque n’a pas été suffisamment diligente dans l’évaluation de votre capacité d’engagement.

Ces informations permettent d’évaluer la capacité de paiement de la personne, et donc a posteriori si la caution était effectivement en mesure d’assurer le paiement du montant de son engagement (Cour d’appel d’Orléans, Chambre commerciale, 11 avril 2024, n° 23/01681).

Conformément aux règles de preuve en droit civil, il revient à la caution de prouver que son engagement était disproportionné par rapport aux revenus dont elle disposait au moment où elle s’est engagée (Cass. com. 2 octobre 2007 n° 06-13.474).

Cela peut résulter par exemple :

  • de l’avis d’imposition qu’elle a communiqué (CA Paris 1-6-2007 n° 05-22456 : RJDA 12/07 n° 1280),
  • du fait que les cautionnements souscrits représentent la totalité de son patrimoine ou encore une année entière voire plusieurs années de revenus (CA Aix-en-Provence, ch. 3 4, 14 févr. 2019, n° 17/19692 ; Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 mars 2020, 19-15.163 ; T. com. Caen, cont. général (délibérés), 4 mars 2015, n° 2014003820),
  • du fait qu’elle était déjà engagée à hauteur de montants importants au titre de cautionnements antérieurs, et que ses revenus et son patrimoine ne pouvaient couvrir le nouvel engagement (Cour d’appel de Dijon, 2e chambre civile, 6 juin 2024, n° 22/00389).

Attention à la réforme du droit des sûretés !

L’ordonnance du 15 septembre 2021 n°2021-1192 portant réforme du droit des sûretés a opéré une simplification du contentieux mais a surtout créé un conflit de loi dans le temps, cette ordonnance s’appliquant uniquement aux cautionnements conclus à compter du 1er janvier 2022.

Il convient donc d’être vigilant quant à la date de signature de l’acte de cautionnement, car le droit applicable ne sera pas le même, les cautionnements conclus antérieurement restant garantis par l’ancien droit.

Ainsi lorsque le cautionnement a été conclu avant le 1er janvier 2022, il répond à la législation antérieure, soit aux articles L332-1, L343-4 et L341-4 du Code de la consommation, selon lesquels : « Un créancier professionnel, tel qu »une banque, ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation de paiement. »

Si la disproportion peut être prouvée, c’est au créancier, souvent la banque, qu’incombe la charge de prouver à son tour que la disproportion a disparu au jour où la caution est appelée en garantie (Cour de cassation, Chambre commerciale, 4 avril 2024 n°22-21.880 ; Cour d’appel d’Amiens, Chambre économique, 23 janvier 2024, n° 22/02145 ; Cour d’appel de Colmar, Chambre 1 a, 12 juillet 2023, n° 21/04735 ; CA Chambéry, 2e ch., 2 févr. 2023, n° 20/00817).

En présence d’un engagement disproportionné, l’acte de cautionnement est inopposable à la caution qui est déchargée de son engagement en totalité (Cass. Com., 13 mai 2014, n°13-13.683).

Autrement dit, le créancier professionnel, la banque, est sanctionné par la déchéance totale, c’est-à-dire par la privation du droit d’invoquer la caution dans son intégralité (Cass.com., 22 juillet 2010, n°09-67.814).
Il convient de préciser que la caution dispose d’un délai de deux ans pour invoquer la déchéance du cautionnement à compter de la demande d’exécution du créancier (Cass.1ère Civ., 23 mai 2000, n°98-16.759).

Cependant, lorsque le cautionnement a été conclu après le 1er janvier 2022, le nouvel article 2300 du Code civil est applicable : « Si le cautionnement souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux revenus et au patrimoine de la caution, il est réduit au montant à hauteur duquel elle pouvait s’engager à cette date. »
Il n’est donc plus possible pour le créancier professionnel de prouver que la caution est en mesure de faire face à son engagement au jour où elle est appelée en garantie.

La sanction qui en résulte est la réduction au montant à hauteur duquel elle pouvait s’engager lors de la souscription au regard de ses ressources et patrimoine de l’époque.

Il n’existe donc plus de déchéance totale de la caution telle que le prévoyait le Code de la consommation.

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Le manquement à l’obligation de mise en garde du créancier professionnel

Tous les créanciers professionnels sont tenus d’un devoir de mise en garde à l’égard de la caution (Cass.com., 13 novembre 2007 ; n°06-12.284 ; Cass.com., 3 mai 2006, n°04-19.315).

Celui-ci leur impose d’avertir la caution si l’engagement qu’elle s’apprête à prendre est inadapté ou risqué (Cass.Com., 27 novembre 2012, n°11-22.706), notamment au regard de l’éventuelle disproportion de son cautionnement (Cass Com 17 février 2007, n°04-19.727).

Elle est accrue en présence d’une caution dite « profane » ayant des ressources modestes, et imposée à l’égard de cautions dites « non-averties » (Cass. com. 15 nov. 2017, n°16-16.790).

Les juges sanctionnent régulièrement les établissements bancaires pour manquement à l’obligation de mise en garde à l’égard des cautions sur le fondement de la responsabilité contractuelle : CA Paris 10 décembre 2009 n°07/13917 ; Cass. com., 1er juill. 2003, n° 00-18.154 ; CA Aix-en-Provence, 19 novembre 2007 n° 08/02396. De même pour les avocats qui sont souvent sollicités pour ce type de litige.

Le préjudice subi s’analyse alors comme la perte de chance de ne pas contracter (Cass.com., 20 octobre 2009 ; n°08-20.274 et Com 12 juillet 2017 / n° 16-10.793).

Depuis la réforme de 2021, sous le nouvel article 2299 du Code civil, la sanction de l’engagement disproportionné suite au défaut de mise en garde par le créancier professionnel est la déchéance du droit de saisir la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci, sans distinction entre caution profane et non avertie. Et cela a pour effet le recouvrement de la créance ainsi que l’exigence d’un paiement équitable.

Le manquement à l’obligation d’information annuelle

Dans le cadre de ses relations contractuelles avec la caution, le créancier professionnel est également tenu à une obligation annuelle d’information de la caution (ancien article 2293 du Code civil et nouvel article 2302 du Code civil).

Cette obligation s’étend au montant du principal de la dette, des intérêts et aux autres accessoires restant dus au 31 décembre de l’année précédente.

Le défaut d’accomplissement de la formalité d’information a pour effet d’entraîner dans les rapports entre la caution et l’établissement bancaire la déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de la communication de la nouvelle information.

Conclusion

Si le contentieux du cautionnement a été simplifié depuis la réforme du droit des sûretés, il s’agit néanmoins toujours d’un contentieux délicat à appréhender et sensible au regard des risques qui pèsent sur la personne engagée en tant que caution.

Notre cabinet d’avocat peut vous accompagner pour défendre vos droits en tant que caution ou engager des poursuites sur le terrain de la disproportion de votre engagement de caution ou des manquements aux obligations contractuelles de votre créancier, notamment pour le recouvrement de la créance et le suivi rigoureux du paiement des montants engagés.

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